Digitalisation & Tendances

Facturation électronique : le guide pour dématérialiser vos factures

Dans le cas de la facturation électronique au Maroc, plus que des outils technologiques à acquérir, les entreprises vont devoir mettre à jour leurs référentiels de données et adapter leurs process internes.

Comme toute réforme fiscale, l’adaptation aux nouvelles règles nécessite un changement de process au sein des entreprises. Dans le cas de la facturation électronique au Maroc, plus que des outils technologiques à acquérir, les entreprises vont devoir mettre à jour leurs référentiels de données et adapter leurs process internes.

Un grand bouleversement attend les entreprises au Maroc. Fin 2025, le système de facturation électronique sur lequel travaille la startup marocaine xHub devrait être finalisé. Après une phase pilote de test, il devrait être opérationnel pour un lancement effectif courant 2026. En attendant le décret d’application qui apportera plus de précision sur les différentes modalités du déploiement du dispositif, ce que l’on sait déjà, et qui est apparu clair dans l’appel d’offres lancé par la DGI en juin 2024, ce sont les caractéristiques techniques du système de facturation électronique privilégiées par l’administration fiscale marocaine, et qui laissent présumer autant de sa robustesse que de sa flexibilité.

Nous savons donc qu’il sera développé sur JAVA EE, une plateforme de développement d’application d’entreprise qui a déjà fait ses preuves. Riche en fonctionnalités, elle assure un grand niveau de flexibilité et de compatibilité des applications développées sous cette norme avec les autres systèmes. L’architecture qui y sera appliquée est de type « microservice », un système architectural qui permet le développement d’une application subdivisée en plusieurs services indépendants. La plateforme supportera deux formats standardisés de factures électroniques (tous deux basés sur le langage XML : Universal business Language) : l’UBL et le CII. Le premier, l’Universal Business Language, est un standard international dédié aux échanges de données électroniques entre différentes entreprises partenaires ; le second format, le Cross industry Invoice, un standard conçu pour assurer des échanges structurés entre entreprises de différents secteurs d’activité.

Haut niveau d’agilité

Le point commun de toutes ces spécificités techniques est le haut niveau d’agilité, d’évolutivité, de modularité, et surtout de sécurisation des données commerciales que proposent ces technologies. Autant de facteurs clés pour garantir une parfaite interopérabilité entre la plateforme de l’administration fiscale et la pléiade de systèmes qui seront adoptés par les entreprises, y compris avec le format UBL, vis-à-vis de partenaires étrangers.

Ce point technique n’est pas anodin. Comprendre à quoi va ressembler le système de facturation électronique est d’une importance extrême pour que les entreprises puissent savoir comment s’y préparer convenablement. Les différentes expériences à l’international ont démontré que c’est souvent de la nature du système adopté et de ses fonctionnalités que dépend la réussite de son intégration ou non. C’est le cas en France, par exemple, où la facturation électronique entrera également en vigueur en 2026. Abandonnant définitivement les PDF, les entreprises seront obligées de passer par une plateforme de dématérialisation, avec deux choix possibles : recourir à une plateforme de dématérialisation privée (PDP) partenaire de l’administration fiscale, qui, reliée directement à la plateforme publique de facturation (PPF), va pouvoir vérifier la conformité de la facture et l’envoyer ensuite au client ; ou, seconde option, faire appel à un opérateur de dématérialisation (OD) privé qui assurera l’intermédiation entre la PDP certifiée et le PPF. OD ou PDP, le cycle de vie de la facture électronique est le même : Premièrement, la création d’une facture sous format électronique ; deuxièmement, l’émission de la facturation à travers une plateforme de dématérialisation ; troisièmement, la vérification de la facture et transmission au client ; et, enfin, quatrièmement, la notification du client sur la réception d’une facture qu’il pourra télécharger et régler. À noter qu’en France, en plus des formats CII et UBL, la réforme propose également la facture X, un format hybride qui comprend aussi bien un fichier PDF que des données dématérialisées.

Les étapes phares

Au Maroc, les entreprises devront d’abord adopter des outils de facturation qui éditent des formats de factures dématérialisées sous format CII ou UBL. Ces outils doivent ensuite être paramétrés de manière à respecter un référentiel commun de données structurées qui rendront possibles leur traitement automatique par d’autres logiciels informatiques. Pour ce faire, il faudra effectuer une mise à jour complète de l’ensemble des informations relatives aux clients et aux fournisseurs. Une fois le paramétrage établi, incluant ainsi toutes les mentions légales exigées par la réglementation fiscale (nom de l’entreprise, adresse, description des biens ou services, prix, quantités, etc.), l’outil établira un modèle XML qui servira de base à l’automatisation du remplissage des factures.

Mais au préalable, elles devront analyser leurs flux de factures émises à leurs clients ou reçues de leurs fournisseurs, le nombre de leurs partenaires commerciaux et leurs habitudes de facturation, pour quantifier le volume de factures et cartographier ainsi les fonctionnalités dont leur outil devrait être doté (automatisation, gestion, paiement, sécurité, reporting…).

Cette étape est importante pour cerner le besoin, ce qui permettra de choisir le format de facture électronique et l’outil d’édition les plus adaptés aux activités commerciales de chaque entreprise. Par exemple, le format CII est souvent privilégié pour assurer des opérations commerciales à l’international. Il présente ainsi une grande variété de fonctionnalités et une richesse technique qui l’avantagent auprès des grandes entreprises par rapport aux autres formats. Et qui le rendent par conséquent compliqué à mettre en place au sein des petites entreprises. En raison de la très grande interopérabilité qu’il offre, l’UBL est lui aussi souvent prisé par les grandes entreprises, notamment pour leurs échanges électroniques B2G. Enfin, le format hybride Facture X, comme on peut l’imaginer, est souvent utilisé par les petites entreprises, puisqu’il répond à des besoins simples, en plus d’être plus accessible, aussi bien techniquement que financièrement, que les autres formats. 

Grand bouleversement

Mais là où la transition vers la facturation électronique au Maroc amènera certainement un grand bouleversement des process internes, c’est au sein des grandes entreprises, où le volume de flux entrants et sortants, la typologie des acheteurs et la nature des canaux d’émission et de réception des factures est immense. Là, on n’est pas dans le cas d’un autoentrepreneur ou un freelance qui va éditer une facture électronique et la transmettre via la plateforme digitale dédiée. Au sein d’une grande entreprise, émettre ou recevoir des factures sous format électronique nécessitera plus qu’un petit logiciel ou ordinateur pour assurer une opération dématérialisée. Si les achats, le contrôle de gestion et la direction financière sont la partie émergée de l’iceberg, en dessous sont également concernées les équipes techniques de la DSI, les équipes de développement des RH, mais également l’ensemble des collaborateurs et tout acheteur potentiel, qui devront intégrer les nouvelles politiques d’achat et tous les changements de process qu’elles induisent systématiquement. Dans certains cas, c’est tout un plan de conduite du changement qui doit être envisagé, avec la mise en place d’une équipe-projet multidisciplinaire dédiée, pour s’assurer une pleine intégration des nouveaux process induit par la facturation électronique par l’ensemble des collaborateurs, qu’ils soient concernés directement ou indirectement.

Il n’est pas vain donc d’insister sur la nécessaire anticipation du passage à la facturation électronique. Pour les PME et TPE, l’enjeu est à la fois technique et financier, puisqu’une facture créée sous format électronique peut revêtir un certain degré de complexité pour un émetteur non formé. Pour les grandes entreprises, le défi majeur est organisationnel : il en va de l’agilité des process et de leur pleine intégration par tout acheteur interne.